
La greffe de cornée, également appelée kératoplastie, est une intervention chirurgicale qui consiste à remplacer une cornée endommagée ou malade par une cornée saine provenant d’un donneur. Cette opération est couramment pratiquée dans les cas de kératocône, de dystrophies cornéennes, d’opacités ou encore de traumatismes oculaires. Bien que les techniques se soient nettement perfectionnées au fil des décennies, la greffe de cornée demeure une intervention délicate, suivie d’une période de récupération et d’un suivi post-opératoire attentif. Cet article explore les suites habituelles d’une greffe de cornée, en mettant en lumière les étapes de la convalescence, les risques potentiels, les signes de complications et les mesures nécessaires à la réussite du greffon.
1. La période post-opératoire immédiate
Les premières 24 à 72 heures après l’intervention sont cruciales. Le patient doit garder l’œil opéré protégé, souvent avec un pansement ou une coque rigide. Des douleurs modérées, une sensation de corps étranger ou une vision floue sont fréquentes mais généralement transitoires. Le port de lunettes de soleil est recommandé pour limiter la sensibilité à la lumière (photophobie).
Le médecin prescrit généralement un traitement local à base de collyres antibiotiques et corticoïdes, qui permet de prévenir les infections et de contrôler la réponse inflammatoire. Il est essentiel de suivre scrupuleusement la posologie et la durée du traitement afin d’éviter les risques de rejet ou de complications infectieuses.
2. Évolution visuelle progressive
La récupération visuelle après une greffe de cornée est progressive et dépend de nombreux facteurs : la technique utilisée (kératoplastie transfixiante ou lamellaire), la qualité du greffon, l’état de l’œil receveur, ainsi que l’absence de complications.
Dans les semaines qui suivent, la vision s’améliore lentement. Il est important de noter que la vision ne redevient pas immédiatement nette, même si l’opération est techniquement réussie. La stabilisation de l’acuité visuelle peut prendre plusieurs mois, voire un an dans certains cas. Des verres correcteurs (lunettes ou lentilles rigides) peuvent être nécessaires pour corriger l’astigmatisme post-opératoire.
3. Les soins et restrictions après la greffe
Après l’intervention, plusieurs précautions sont à respecter pour assurer la bonne cicatrisation du greffon :
- Éviter les frottements oculaires, qui peuvent provoquer un déplacement ou un rejet du greffon.
- Limiter les efforts physiques intenses pendant plusieurs semaines, notamment les sports de contact ou les activités exposant à la poussière ou à des agents pathogènes.
- Respecter les consultations régulières chez l’ophtalmologiste, qui permettent de surveiller l’évolution de la greffe et d’adapter les traitements.
- Utiliser les collyres selon les prescriptions : l’arrêt prématuré ou l’usage inapproprié de corticoïdes peut favoriser le rejet ou les infections.
4. Les signes habituels et les alertes
Certains signes sont normaux dans les suites d’une greffe de cornée :
- Une vision fluctuante selon les jours.
- Une légère rougeur oculaire.
- Une sensation d’œil sec ou d’irritation.
Cependant, certains symptômes doivent alerter et inciter à consulter rapidement :
- Une baisse brutale de la vision.
- Une douleur oculaire intense et persistante.
- Une rougeur accrue avec photophobie.
- Un œdème cornéen (cornée trouble).
- Un voile devant l’œil.
Ces signes peuvent évoquer un rejet du greffon ou une infection, nécessitant une prise en charge urgente.
5. Le rejet de greffe : un risque majeur mais maîtrisable
Le rejet est l’un des principaux risques post-opératoires, bien qu’il puisse survenir à tout moment, même plusieurs années après la greffe. Il s’agit d’une réponse immunitaire du receveur contre les cellules du greffon. Le rejet peut être épithélial, stromal ou endothélial, ce dernier étant le plus sérieux.
Les signes d’un rejet sont regroupés sous l’acronyme RSVP :
- Rougeur
- Sensibilité (douleur)
- Vision floue
- Photophobie
Le traitement repose sur l’intensification des corticoïdes, parfois par voie générale. Pris à temps, un rejet peut être réversible dans environ 80 % des cas. D’où l’importance capitale du suivi ophtalmologique régulier.
6. La suture et son retrait
Lors de la greffe, le greffon est généralement fixé à l’œil receveur par des sutures microscopiques. Ces fils, souvent en nylon, peuvent être laissés en place plusieurs mois, voire un an, selon la stabilité de la cornée.
Le retrait des fils se fait en consultation, de façon progressive. Il peut entraîner de légères modifications visuelles, parfois bénéfiques. Il est indolore dans la majorité des cas, bien que parfois gênant.
7. Complications possibles à long terme
Outre le rejet, d’autres complications peuvent apparaître dans les mois ou années suivant la greffe :
- Hypertension oculaire ou glaucome secondaire, favorisé par l’usage prolongé de corticoïdes.
- Opacification du greffon, parfois liée à un rejet chronique ou à une dégénérescence.
- Infections oculaires, notamment chez les patients immunodéprimés ou peu observants.
- Défauts réfractifs importants : astigmatisme irrégulier, myopie, qui peuvent nécessiter des lentilles rigides ou une chirurgie réfractive secondaire.
8. Résultats à long terme et qualité de vie
Dans la majorité des cas, la greffe de cornée améliore significativement la qualité de vie visuelle du patient. Les techniques modernes, comme la kératoplastie lamellaire postérieure (DMEK, DSAEK), permettent une récupération visuelle plus rapide avec moins de risques de rejet.
Le taux de survie du greffon à 5 ans est supérieur à 80 % dans les centres spécialisés, en particulier lorsque la greffe est réalisée pour des pathologies non inflammatoires comme le kératocône.