
Les maladies cardiovasculaires représentent l’une des principales causes de mortalité mondiale. En Afrique, leur prise en charge varie considérablement selon les pays, en raison des disparités économiques, infrastructurelles et géopolitiques. Cet article compare la cardiologie en République Démocratique du Congo (RDC) et en Tunisie, en analysant trois critères clés : le coût des soins, l’infrastructure médicale, et les compétences des professionnels de santé.

1. Coût des Soins Cardiologiques
RDC (Congo) : Des Coûts Bas, Mais un Accès Limité
En RDC, le système de santé est largement sous-financé. Les dépenses publiques en santé ne dépassent pas 5 % du budget national, selon la Banque Mondiale. Les coûts des soins cardiologiques sont théoriquement bas comparés aux standards internationaux, mais leur accessibilité reste un défi majeur :
- Consultation : Entre 10 000 et 50 000 FCFA (15 à 75 USD).
- Échocardiographie : Environ 100 USD.
- Pontage coronarien : 3 000 à 5 000 USD (dans les cliniques privées de Kinshasa).
Cependant, 80 % de la population congolaise vit avec moins de 2 USD par jour, rendant ces tarifs inabordables pour la majorité. Les assurances santé sont rares, et les hôpitaux publics manquent souvent de matériel, obligeant les patients à se tourner vers le secteur privé.
Tunisie : Une Destination Médicale Abordable
La Tunisie se positionne comme une destination de tourisme médical, notamment pour les pays d’Afrique subsaharienne et du Maghreb. Les tarifs y sont 30 à 50 % moins chers qu’en Europe, tout en offrant des normes de qualité élevées :
- Consultation cardiologique : 50 à 100 USD.
- Angioplastie : 3 500 à 5 000 USD.
- Chirurgie à cœur ouvert : 8 000 à 12 000 USD.
Le système de santé tunisien propose des forfaits tout compris (hébergement, billet d’avion), attirant des patients étrangers. La présence d’assurances publiques et privées facilite également l’accès pour les Tunisiens.
2. Infrastructure Médicale
RDC : Un Déficit Criant en Équipements
La RDC compte moins de 10 hôpitaux équipés pour les interventions cardiaques complexes, principalement à Kinshasa et Lubumbashi. Le pays souffre d’un manque chronique d’appareils de diagnostic (IRM, scanners cardiaques) et de salles de cathétérisme. Les coupures d’électricité et le manque de pièces détachées paralysent souvent les équipements existants.
Seules quelques structures privées, comme la Clinique Ngaliema ou le Centre Hospitalier Monkole, disposent de blocs opératoires fonctionnels pour la cardiologie. En zone rurale, les centres de santé primaire sont souvent incapables de gérer même une insuffisance cardiaque basique.
Tunisie : Une Infrastructure Modernisée
La Tunisie dispose d’un réseau de cliniques spécialisées et de centres hospitalo-universitaires (CHU) de référence, comme :
- L’Institut National de Cardiologie de Tunis (équipé de salles hybrides pour chirurgie mini-invasive).
- Le CHU La Rabta (pionnier en pose de stents coronariens).
- Des cliniques privées comme Clinique Pasteur ou Clinique Les Berges du Lac, dotées de technologies de pointe (IRM 3 Tesla, robots chirurgicaux).
Le pays compte 23 centres de cardiologie interventionnelle, capables de réaliser des angiographies et des poses de prothèses valvulaires. L’État investit régulièrement dans la modernisation des équipements, soutenu par des partenariats européens.
3. Compétences Médicales
RDC : Un Manque de Spécialistes
La RDC forme moins de 10 cardiologues par an, pour une population de 100 millions d’habitants. La majorité des médecins qualifiés travaillent dans les grandes villes ou quittent le pays (« fuite des cerveaux »). Les interventions complexes (chirurgie valvulaire) nécessitent souvent le recours à des experts étrangers, notamment cubains ou belges.
Néanmoins, des initiatives locales émergent, comme la Société Congolaise de Cardiologie, qui organise des formations continues avec l’appui de l’OMS.
Tunisie : Une Expertise Régionale Reconnue
La Tunisie forme plus de 50 cardiologues annuellement dans ses facultés de médecine (Tunis, Sousse, Sfax). Beaucoup de praticiens sont diplômés de facultés françaises ou canadiennes et maîtrisent les techniques les plus récentes (transcatheter aortic valve implantation – TAVI).
Le pays accueille régulièrement des congrès internationaux de cardiologie, et ses médecins publient dans des revues scientifiques indexées. Cette expertise explique pourquoi des patients venant du Mali, du Tchad ou même d’Europe francophone choisissent la Tunisie pour leurs soins.
4. Défis et Perspectives
En RDC :
- Financement : Dépendance à l’aide internationale (Banque Mondiale, ONG).
- Instabilité politique : Freine les investissements dans la santé.
- Projets d’espoir : Construction du Centre Cardio-Pédiatrique de Kinshasa (soutenu par la Fondation Chain of Hope).
En Tunisie :
- Concurrence régionale : Maroc et Turquie attirent aussi des patients.
- Inégalités régionales : Les zones rurales tunisiennes restent sous-équipées.
- Ambitions : Devenir un hub médical africain grâce à des partenariats public-privé.